Pratiques funéraires chez les Sereers : enquêtes de terrain

A l’étude et à l’exploitation des données issues des ruines monumentales funéraires protohistoriques que nous proposons dans une thèse de doctorat, se greffe une approche actualiste des coutumes funéraires sénégambiennes contemporaines. Au début des années 1980, V. Martin et C. Becker nous ont précédés sur la question, en livrant une description de cimetières et quelques dessins sur l’architecture de tumulus Sereer du Sénégal. Toutefois, l’approche utilisée par ces prédécesseurs se dépouille de toute réflexion archéologique intégrée (Martin et Becker, 1982). A la différence, notre apport consiste à intégrer cette dimension ethnographique des tumulus Sereer, dans une réflexion archéologique, en confrontant la tradition orale qui en découle, aux données archéologiques des ruines monumentales sénégambiennes à la lumière des fouilles les plus récentes.

Figure 1 : Entretien collectif à Soum (Fatick), Cliché : A. K. Faye

Le recueil de la tradition orale auprès des Sereer s’est fait concomitamment aux fouilles de la nécropole de Tiékène-Boussoura. Il découle du souvenir encore vivant de pratiques funéraires connues au sein de cette ethnie et qui sert d’apports dans la compréhension et l’interprétation des pratiques funéraires protohistoriques en Sénégambie. Notre démarche de terrain s’est articulée autour de choix faits. Les personnes âgées étaient au premier chef, les cibles visées dans ce travail. Furent également interrogés, des personnes connues du milieu universitaire ou tout simplement du milieu académique et dont certains sont considérés aujourd’hui comme des référents crédibles sur les questions funéraires en milieu Sereer. Au gré de renseignements, notre dernier choix fut porté sur les griots, une frange légitime de la population connue au Sénégal et plus largement en Afrique de l’ouest comme les conservateurs de la mémoire des peuples (Niane, 1971). L’approche du terrain fut un temps, évolutive et en des circonstances, le protocole de départ notamment le critère de l’âge retenu, a été quelquefois relégué au second plan au profit de la qualité de l’informateur considéré plutôt pour sa connaissance des traditions Sereer.

Figure 2 : Entretien individuel à Ndorong (Région de Fatick), A. K. Faye.

Au terme de trois campagnes de collecte de la tradition orale au Sénégal, un corpus total de quarante-six informateurs a été mobilisé. Celui-ci se structure en vingt-deux entretiens dont sept réalisés de façons collectives et dix-sept de façon individuelles (fig. 1 et 2). L’espace géographique couvert dans cette enquête s’est étendu sur cinq régions : Dakar, Thiès, Diourbel, Fatick et Kaolack (fig.3). L’analyse de l’ensemble du corpus recueilli est en cours et permettra de faire avancer l’interprétation et d’en confirmer d’autres, sur bien des questions actuelles soulevées par l’archéologie des monuments funéraires du Sénégal et de la Gambie. Des travaux similaires dans d’autres zones du Sénégal, notamment dans le pays Bassari au sud-est du Sénégal, peuvent être aussi pertinents, car les architectures funéraires traditionnelles des populations de cette zone, inspirent de réelles similitudes avec les monuments mégalithiques du centre ouest sénégalais.

Figure 3 : Distribution géographique des entretiens.